MOURIR POUR DES IDEES...
Par Bassirou S. NDIAYE
On meurt pour des idées, on ôte la vie aussi pour des idées.
La vérité ne tient qu’à l’intime conviction que chacun se fait de la qualité de ses idées et de la légitimité des armes utilisées pour les défendre. La lutte pour la liberté en est jonchée de malheureux innocents comptabilisés comme les victimes collatérales qu’on justifie ou regrette. La liberté d’action et de pensée, la liberté d’exister autrement que ne le fixe une norme à laquelle on ne se reconnait pas, a souvent été synonyme d’atroces souffrances, d’inhumaines actions.
Des secrets militaires jalousement gardés
Il faut savoir qu’un contentieux existe entre l’Occident en général et la France en particulier, et les religions. Autant l’Etat garantit et réprime la représentation de ses secrets (militaires et industriels par exemple), autant il juge normal qu’une presse transgresse les interdits des religions. Ce qui est en cause ce ne sont sûrement pas les dessins moches mais bien la représentation imagée du prophète (PSL). La communauté musulmane en France l’a fait savoir et a été déboutée par la justice. Comme d’autres religions agressées, l’Islam officiel s’est rangé dignement, a condamné et s’est démarqué de toute autre forme d’action qui pourrait être engagée en son nom. Dans le même temps, « le pays de la liberté, de l’égalité et de la fraternité» a déployé un zèle fou à capturer et à livrer Edward Snowden, allant jusqu’à détourner l’avion du Président de la république de Bolivie. Edward Snowden étant ce citoyen américain qui a révélé le plus grand scandale d’espionnage et de violation des libertés individuelles et collectives mis en place par les autorités yankees à l’échelle planétaire. Comment alors empêcher Snowden de dire ce qu’il pense, le condamner pour violation d’interdits d’un Etat et protéger des journalistes auteurs d’outrages à des milliards d’hommes ? N’était-il pas plus simple d’inviter à un consensus pour le respect des interdits et des traditions sacrées des groupes humains indépendamment de leurs puissances ? Le monde s’en porterait certainement mieux.
Des terroristes de Boko Haram
Le succès des manifestations du 11 janvier 2015 en France et dans le monde n’a certainement pas répondu à la question pour quoi et pour qui marche–t-on ? Contre quoi et contre qui marche-t-on ? La terreur imposée par des fanatiques insensés ne justifie pas une caution donnée aux auteurs de lynchage médiatique. Parce qu’un lynchage médiatique reste un lynchage à condamner. La plupart des manifestants de la journée « je suis Charlie » ignore que ce ne sont pas les « pensées moyenâgeuses » qui massacrent quotidiennement et dans l’indifférence des Charlie Ben Youssef et des Fatima hebdo en Iraq, en Lybie, en Syrie, des Coumba Yekini au Nigéria, des Samba Coulibaly au Mali et ailleurs, mais bien des bandes entrainées aux maniement des armes les plus sophistiquées produites et fournies par l’occident, certainement avec une garantie d’entretien et de maintenance.
Qu’on ne s’y trompe pas, le jihad tel qu’on le vit de nos jours est un concept révisé et réadapté par les occidentaux pour nuire à l’URSS dans un premier temps et à la Umah islamique ensuite. « Al Qaïda » qui désigne le camp n’est à l’origine autre que le centre d’entrainement conçu et financé par les américains. Ce jihad qui place des bombes dans les mosquées dans les marchés n’a donc rien à voir avec l’islam du prophète Mohamed PSL.
Accointances entre CIA et Al Qaida
Le jihad n’est pas une religion, encore moins une pensée philosophique structurée. C’est un clone monstrueux issu des flancs de la matière islamique et de la pensée machiavélique de l’impérialisme mondial. Il faut donc être naïf pour penser qu’il est possible de dialoguer avec le jihad ou de le raisonner. Aucune forme de dialogue ne l’engage, ni le dialogue nord-sud et encore moins le dialogue des religions. C’est pourquoi, il dérange comme dérangerait n’importe quel monstre apparu au sein d’une famille ou d’une espèce dont il se réclamerait malgré ses différenciations. Encensée en Afganistan et en Algérie par l’Occident, discrètement soutenue par des pays musulmans en Syrie, en Lybie, au Nigéria et au Mali, l’action du Jihad reste cette ambivalence que tous condamnent en n’hésitant pas à s’en servir pour des intérêts bassement égoïstes.
Les groupes islamistes dérangent parce qu’ils sont des monstres féroces apprivoisés et lâchés au milieu de sociétés. Armés par l’Occident, manipulés par des maitres aux visages multiples et contradictoires voire antagonistes, ils savent attaquer à dessein pour répondre à une commande. Incontrôlables comme tous les monstres, ils échappent parfois à la vigilance et aux prévisions allant jusqu’à s’attaquer à leurs maitres. Les illuminés individuels et collectifs à la périphérie de la mouvance islamique ne sont alors que les épiphénomènes tragiques que l’on cherche vainement à rattacher à un ensemble ou à expliquer.
L'épique bataille d'Alger en 1957
La plupart des manifestants de la journée « je suis Charlie » n’a pas connu les dures années de lutte pour la libération nationale ou contre l’occupant nazi lors de la seconde guerre mondiale. Elle n’a pas eu à s’indigner quand un train de passagers sautait sur une voie ferrée, quand un « collabo » ou supposé tel était exécuté, lorsqu’une infrastructure était bombardée parfois avec ses occupants du moment. Elle n’a aucun souvenir de la « bataille d’Alger », des tortures et des assassinats des leaders nationalistes dans le tiers monde. Elle n’a pas eu à s’indigner des massacres d’écoliers de Soweto en 1976, des bombardements au napalm des populations vietnamiennes au « nom de la liberté », des pilonnages d’écoles et des démolitions de maisons palestiniennes, en plein hiver parce leurs occupants auront osé remettre en cause l’ordre sioniste.
La démocratie c’est un fait, doit beaucoup à la presse. Mais la presse doit certainement autant, peut-être largement plus à la démocratie. Autant on ne s’imagine pas une démocratie sans la presse, autant une presse n’est viable que dans une démocratie. Or, la démocratie passe par le respect des convictions de l’autre. La presse après avoir payé un lourd tribut a gagné ses galons pour siéger au « Cercle Mess des pouvoirs ». En tant que pouvoir, elle doit désormais en assumer le statut, parce que comme tous les pouvoirs elle fait peur pour sa capacité de nuisance, elle opprime et réprime avec des armes qu’elle manie le mieux, le verbe, l’image et la plume. Parce qu’elle impose un ordre sans en avoir les moyens elle s’est faite l’alliée de pouvoirs politiques, financiers et idéologiques armés qui la protègent en tant que telle en lui réclamant des impôts en nature ou en espèces, matériels et immatériels.
Le quatrième pouvoir
Malgré tout ce que la démocratie en général doit à la presse, la liberté de presse ne pourrait se confondre avec la liberté tout court, la liberté des individus et des collectifs. De par sa ligne éditoriale, la presse prend des positions politiques et idéologiques qui en font un acteur parmi les parties et partis en conflit. Elle évolue à travers le jeu des alliances dans un champ de bataille aux frontières physiques et idéologiques définies et sécurisées par la puissance politique, financière et idéologique armée. Voilà pourquoi l’insécurité de la presse est immédiatement perçue comme une faiblesse du pouvoir politique, financier et idéologique armé, allié et garant de cette sécurité.
En invitant au « duel loyal », la presse n’en impose pas moins à ses adversaires un jeu cruel : « on vous attaque par le verbe, l’image et la plume, défendez vous par le verbe, l’image et la plume si vous n’êtes pas des lâches ». Imposer l’arme qu’on maitrise le plus à l’adversaire n’est certainement loyal, mais c’est la tactique classique des pouvoirs parce que tous les pouvoirs se sentent fragiles face à l’usage d’autres types d’armes que ceux qu’ils maitrisent. Le pouvoir militaire craint le verbe, l’image et la plume, le pouvoir politique et financier l’usage des armes de guerre. La paix en devient l’équilibre de forces, donc de respect de la terreur qu’impose la capacité de nuisance du camp adverse, avec ses armes.
C’est une évidence, la presse respecte bien cet équilibre. Elle respecte les interdits quand celles-ci désignent des frontières terrestres et maritimes, des secrets industriels et des zones militaires, des dossiers inavouables des grandes puissances.
Au cœur des grandes mutations historiques de l’occident, l’église catholique a souvent fait profil bas pour son rôle pas toujours glorieux dans la lutte pour la démocratie et l’émancipation des peuples. Après les guerres de croisés, la traite des noirs, les inquisitions de triste mémoire, les exorcismes avec leurs balances truquées et leurs buchers, ses alliances avec les dictatures, elle a été vaincue et a du subir comme telle la loi des vainqueurs au rang desquels la presse figurait en bonne place. C’est malheureusement ça l’histoire, difficile à revendiquer, mais à assumer quand même.
En s’inventant et en se représentant un prophète nomade blond aux yeux bleus au milieu du désert, elle a permis des répliques d’abord contradictoires puis de plus en plus tournées vers la dérision de ses valeurs les plus fondamentales : le Messie. Aujourd’hui elle s’en accommode, se réforme pour conformer Dieu aux désirs de « l’homme moderne ». Avec ses brebis galeuses nichées au sommet de la hiérarchie accusées de pédophilie et d’homosexualité, elle a aussi fait profil bas quand des débats majeurs sur le mariage étaient à l’ordre du jour.
L’islam ne souffre pas de ce complexe du moins pour le moment. Mais dans cinq cents ans, dans un millénaire peut être, il sera certainement plus lourdement chargé et devra faire profil bas. Parce qu’il aura fait ou laissé faire en son nom massacres, génocides, viols, violence et terreurs, il va devoir transiger ou disparaitre de la mémoire d’une humanité de plus en plus encline à dire à Dieu et aux dieux comme un enfant à ses géniteurs : « je suis majeur et n’accepte plus d’être géré comme un enfant, même un enfant de Dieu ou des Dieux ».
Exclue du paradis pour désobéissance, l’Humanité perdra peut être alors jusqu’à son droit d’asile sur terre par la faute de ceux qui ont fait ou laissé faire tout ce que Dieu et les Dieux avaient interdit.
BANDIA, JANVIER 2015.
Georges Brassens - Mourir pour des idées
Pour Georges BRASSENS : nous voulons bien mourir pour des idées !!!
MOURIR POUR DES IDEES, ..............MAIS DE MORT LENTE !!!!
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