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LE BLOG DE NIOXOR TINE

DIVISION DE LA GAUCHE SENEGALAISE: CE QU'EN PENSE GUY MARIUS SAGNA.

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A la veille d’élections présidentielles capitales pour l’avenir politique de notre pays et après les soubresauts ayant secoué Bennoo Siggil Senegaal et ayant abouti au désastre que tout le monde connait, de nombreux militants de gauche ressentent la nécessité incontournable du renforcement des partis de gauche sur la scène politique nationale. C’est dans cette optique que nous publions la contribution du camarade Guy Marius Sagna, bien connu sur la toile et sur le terrain de la lutte concrète (Tambacounda, Casamance….). Loin de partager toutes ses opinions, nous pensons le moment venu de faire preuve de moins de frilosité et d’oser débattre avec nos camarades issus des cercles de gauche, dont beaucoup sont animés de bonne foi et de générosité, ce qui n'est pas toujours le cas de nos alliés socio-démocrates ou libéraux, avec lesquels il nous arrive de nous retrouver dans des cadres unitaires. Qu’est ce qui peut expliquer qu’on puisse nouer des alliances électorales avec Wade, Niasse, Macky, Tanor et que nous ayons autant de difficultés à instaurer un dialogue constructif avec des camarades se réclamant de la gauche prolétarienne ? C’est pourquoi, nous posons, en toute démocratie, le débat et laissons à l’opinion publique le soin de le trancher en toute objectivité !

La bipolarisation politique facteur historique de la division de la gauche  sénégalaise : Passons du démembrement au rassemblement !

Cela ne peut signifier qu’une chose : non pas qu’il n’y a pas de route pour en sortir, mais que l’heure est venue d’abandonner toutes les vieilles routes (celles qui nous ont conduit au naufrage actuel de notre famille politique). Aimé Césaire 

Le Sénégal vit,  à quelques mois de  l’élection présidentielle de février 2012, la crise pré-électorale la plus grosse d’incertitudes de son histoire. Populations éprouvées, république menacée, corruption généralisée, naufrage moral qui engendrent un ras le bol généralisé. Les graves menaces qui planent sur notre pays exigent un front uni du peuple pour juguler et écarter la destruction des conquêtes démocratiques par le principal bénéficiaire de l’alternance conquise de haute lutte par le peuple en 2000.      

Cette tâche nationale du moment imposée par les projets funestes du pouvoir n’est nullement opposée au nécessaire travail d’unir notre famille politique pour en faire une force indépendante alternative au service des classes populaires. En effet après plus de 50 ans d’expériences de lutte, nous constatons que la gauche sénégalaise n’a toujours pas l’initiative. Et c’est légitimement que se posent à nous un certain nombre de questions. Qu’est ce qui n’a pas marché ? Que faire ? L’heure d’un nouveau manifeste n’a-t-elle pas sonné ? 

Les émeutes de la faim et de l’électricité ; la révolte des marchands ambulants ; celles des jeunes de Kédougou contre la main basse sur les ressources minières nationales en 2008 ; celle des paysans contre l’accaparement de leurs terres comme récemment à Fanaye, à Sangalkam, à Mbane, celle des populations sinistrées par les inondations ; et la mobilisation nationale du 23 juin 2011 contre un 16e viol de la constitution constituent autant d’éléments montrant que l’élément objectif est prêt. 

Si les mouvements Y en a marreBess du niakDafa doy, Wade dégage sont des manifestations salvatrices légitimes de la résistance du peuple, la multiplicité des déclarations de candidatures, notamment de la société civile,…sont la preuve de l’horrible vide laissé par la gauche sénégalaise dans l’arène politique. Portes ouvertes à tous les marchands d’illusions et au choix de l’embarras pour le peuple. L’élément subjectif n’est pas prêt. Le peuple, après 50 ans de patience douloureuse, devra encore attendre sur le parvis de l’église avec son bouquet de fleurs fanées à la main. Que de rendez-vous manqués car non préparés ! Que de rendez-vous non préparés parce la gauche a été piégée par l’inextricable labyrinthe de la bipolarisation politique sénégalaise.

Le piège suppose 3 éléments : le piégeur, le dispositif, le piégé.

D’abord, une réflexion sur le piégeur pose la question des ambitions poursuivies par celui-ci. Les deux faces du semi colonialisme que sont impérialistes d’une part et collaborateurs bourgeois locaux d’autre part sont les piégeurs. L’impérialisme a besoin de réservoirs de matières premières et de déversoirs de produits manufacturés pour éviter la révolution en son centre. Cécile Rhodes en 1895 disait : « J'étais hier dans l'East-End (quartier ouvrier de Londres), et j'ai assisté à une réunion de sans-travail. J'y ai entendu des discours forcenés. Ce n'était qu'un cri : Du pain ! Du pain ! Revivant toute la scène en rentrant chez moi, je me sentis encore plus convaincu qu'avant de l'importance de l'impérialisme... L'idée qui me tient le plus à cœur, c'est la solution du problème social, à savoir : pour sauver les quarante millions d'habitants du Royaume-Uni d'une guerre civile meurtrière, nous, les colonisateurs, devons conquérir des terres nouvelles afin d'y installer l'excédent de notre population, d'y trouver de nouveaux débouchés pour les produits de nos fabriques et de nos mines. L'Empire, ai-je toujours dit, est une question de ventre. Si vous voulez éviter la guerre civile, il vous faut devenir impérialistes » (cité par Lénine, chapitre VI de Impérialisme stade suprême du capitalisme). La permanence de la « question de ventre » encore aujourd’hui, comme en Grèce, en Irlande, en Italie, en France, aux USA… comme le posent les indignés et les travailleurs en lutte des pays du centre du capitalisme mondial, entraine la nécessité des guerres coloniales de l’impérialisme comme en Libye, en Irak, en Afghanistan, en ex-Yougoslavie.

Ensuite, la hardiesse, l’enthousiasme et la témérité du semi colonialisme qui flaire des bénéfices raisonnables pouvant aller jusqu’à 50%, voire 300% pour parler comme Marx dans Le Capital,  incite celui-ci à mettre en place un piège pérennisant le pillage du Sénégal en subordonnant ce dernier à l’impérialisme par l’arrimage de la gauche aux collaborateurs et complices locaux des impérialistes pour avoir un semi colonialisme parfait.

Avant et pour cela, l’impérialisme et ses suppôts avaient opté pour la répression et le maintien dans la clandestinité des forces politiques opposées au consensus semi colonial. Des camarades comme Sadio Camara, Madické Wade, Alla Kane, etc, en rendent compte. Maître Babacar Niang révèle que « du mois de mars 1962 au mois d’octobre 1975, la juridiction d’exception sous Senghor a prononcé plus de trois cents années d’emprisonnement, plus de deux cents années de travaux forcés à temps, plusieurs condamnations à perpétuité, dont deux condamnations à mort exécutées ». De haute lutte, la gauche patriotique, anti impérialiste et panafricaine arracha le droit à l’existence légale par la conquête du multipartisme.

La répercussion des divergences et luttes idéologiques du mouvement communiste international sur le plan national, le subjectivisme et la mauvaise gestion des divergences, la faiblesse de la composition ouvrière, la jeunesse du mouvement révolutionnaire national…ont d’abord constitué les maladies infantiles de la gauche sénégalaise durant ce 1er cinquantenaire après les indépendances. Maladies qui ont provoqué le démembrement du PAI qui avait réussi jusqu’à un certain point à conjurer la bipolarisation politique datant de l’époque de Blaise Diagne.

Au tassaro qui en résulta, le semi colonialisme ajouta des mesures qui ressuscitèrent la bipolarisation que sinon seule l’unité du moins un grand parti de gauche pouvait à nouveau conjurer. Parmi ces mesures on peut citer la création d’un parti de contribution, la fixation de caution censitaire, l’attitude de la presse publique (dont se fait complice une partie de la presse privée), les fraudes électorales et comme le disait le doyen Magatte Thiam, les stratégies d’Abdou Diouf consistant à « détourner les votes au profit du PS (…), mais aussi au profit des partis de l’opposition dont il veut artificiellement entretenir la crédibilité ».

Malgré quelques intermèdes vains d’unité qui ne surent dépasser le cadre électoral, la gauche sénégalaise passa du tassaro au benno autour des libéraux dans l’opposition avant 2000 et autour de la social-démocratie après 2000. La maladie du réformisme, de la collaboration de classe et de la lutte des places a laminé et jeté un discrédit sur la classe politique y compris notre famille politique dans la dernière période. Résultat : après 2000,  notre famille politique éclatée s’est encore plus émiettée que les scissions connues par le PAI. Résultat : l’extrême faiblesse électorale de nos organisations mesure comme le disait Engels du niveau de conscience du moment de la classe ouvrière. Mesure de notre travail en direction des masses ouvrières, paysannes et populaires. Résultat : la gauche a une prise insuffisante sur la réalité des luttes comme le montrent les mobilisations populaires des 23 et 27 juin 2011.

Résultat : après avoir porté les libéraux au pouvoir en 2000, la gauche, pour n’avoir pas suffisamment en charge la tâche stratégique de construction de son unité, s’investit aujourd’hui encore, dans le choix difficile du candidat de l’unité et du rassemblement entre deux prétendants de la social-démocratie pour l’élection présidentielle de 2012.

Aujourd’hui encore, comme le constataient les 23 signataires du manifeste du PAI en 1957, « (…) la réalité s’est chargée de démontrer qu’on ne va pas en guerre en laissant ses armes de côté. Elle fait justice de cette erreur. »

La persistance, jusque là, de la gauche sénégalaise à s’inscrire stratégiquement dans la bipolarisation politique est une acceptation du système d’alternance unique entre sociaux-démocrates libéraux et libéraux, entre deux fractions de la bourgeoisie. Système-piège qui dès lors qu’on y participe n’autorise aucune alternative.

Il nous faut débipolariser l’esprit de notre famille politique qui s’est figée sur l’idée selon laquelle il n’y a pas d’alternative pour la gauche que d’être souteneur des autres familles politiques. 

C’est le triomphe définitif d’un piège quand le piégé participe consciemment au traquenard.

La gauche est mat pour n’avoir pris sinon aucune initiative sérieuse pour son unité et son rassemblement du moins pour n’avoir eu pour seule initiative que l’unité autour des autres familles politiques.

C’est pourquoi nous pouvons dire avec force que l’heure d’un nouveau manifeste a sonné. Un manifeste pour l’unité à retrouver de tout ou partie de notre famille politique après l’avoir perdu depuis les scissions du PAI. Un manifeste pour l’unité autour de l’anti impérialisme, du panafricanisme des ouvriers, paysans, des travailleurs de l’informel et des couches populaires. Un manifeste pour l’unité autour d’un journal, l’unité autour d’un programme de formation politique et idéologique. Un manifeste qui privilégie l’unité stratégique autour de notre famille politique tout en s’impliquant comme nous savons si généreusement le faire dans les unités tactiques pour préserver les acquis démocratiques.

Ce manifeste pour l’unité permettra d’œuvrer à la recherche pour élaborer un projet collectif de gauche de sortie du sous développement ; une unité autour de l’édification d’une organisation forte de gauche ; une unité autour de notre implication dans les luttes des sections de notre peuple ; une unité pour mettre nos forces ensemble dans les entreprises, les villages et les quartiers, les villes au niveau national en passant par les niveaux départemental et régional, tout en préparant les conditions d’émergences d’un parti de gauche panafricain.

C’est pourquoi les initiatives comme le collectif des 6, espace gauche de Benno, CNP, CNP/CNG… doivent être considérées comme des étapes et sont à saluer. Mais l’avenir c’est d’aller résolument vers la confédération ou la fédération de gauche étape vers l’édification du grand parti de gauche, le parti des ouvriers, des paysans, de l’intelligentsia progressiste du pays. C’est là que réside toute la signification de l’adoption le 24 août 2011 de la feuille de route « POUR LA FONDATION DE LA CONFEDERATION DES PARTIS ET ORGANISATIONS DE LA GAUCHE REVOLUTIONNAIRE AU SENEGAL, CONFEDERATION DE LA GAUCHE PANAFRICANISTE DU SENEGAL ».

Cette volonté déjà exprimée par le RND, YAW et F/MTP-S doit être poursuivie et renforcée jusqu’à la tenue de la conférence nationale de lancement de cette confédération/fédération. Jusqu’à la publication ce jour là du nouveau manifeste avec symboliquement 23 nouveaux signataires personnalités et responsables d’organisations acquises à l’unification de notre famille politique la gauche Sénégalaise section de la gauche Africaine. JE SIGNE, SIGNONS CAMARADES ET ALLONS DE L’AVANT !

Guy Marius SAGNA ; email: guymarius_sagna@yahoo.fr

QUELQUES OBSERVATIONS DU CAMARADE BAMBA NDIAYE

  • Il y a de plus en plus une reconnaissance par la variété de partis et d'organisations de gauche de la place du Manifeste du PAI de 1957 et cela suite a l'initiative d'organiser le cinquantenaire du Manifeste du PAI. Initiative venant de camarades di Parti et dont les premières réunions se tenaient toujours a Xaar Yalla au Siège du PIT!
  • la deuxième observation porte sur le statut du PAI et ensuite du PIT comme le Parti des travailleurs de ce pays. Différents groupes ont eu à quitter le Parti sur la base du refus de considérer le Parti comme celui des travailleurs de ce pays: 1962 avec Mbaye Niang et ses amis, 1965 avec le PCS des Samba Ndiaye qui allait servir de terreau aux groupes maoïstes: Reenu reewmi, Xarébi, UDP, AJ; le départ des fondateurs de la ligue (Babacar Sané, Mbaba Guissé, Elimane Kane, Moussa Kane entre autres) sur la base de la mort programmée du PAI, sur le refus du Parti clandestin, sur le refus de la place des révolutionnaires professionnels dans le Parti et sur le refus des décisions du congrès de 1972); un autre groupe à mentionner est celui de Rufisque (GR ou Groupe de Rufisque) ave les Fallaye Noël Diop qui amorcera la rupture après la conférence Nationale de 1978; Une autre variante de la gauche qui a toujours conteste le PAI/PIT est elle des trotskystes regroupés autour du GAREP (abordé dans le Manifeste de 1957 du PAI) de Abdoulaye Ly dans les années 50, spécialistes en entrisme dans le gouvernement  de 1956 de Mamadou Dia (Abdoulaye Ly, Assane Seck, Amadou Makhtar Mbow), animateur du PRA et des spécialistes des retournements spectaculaires durant tout le régime UPS-PS.
  • Reconnaitre le Manifeste du PAI,  comme l’acte fondateur majeur de la gauche moderne sénégalaise et en même temps refuser au PIT  cet héritage est un exercice difficile auquel s'adonnent beaucoup d anciens camarades et amis des autres Partis et groupes de la gauche sénégalaise.
  • Ce que le PIT est devenu est le résultat d'un processus cinquantenaire de luttes politiques et idéologiques pour l’affirmation de la permanence de l’existence et du rôle du Parti de l'indépendance et du Travail 
  • Mbaye Niang et ses amis ont disparu derrière le Masque indispensable (RND,PLP)
  • La Ligue démocratique a abandonné à son dernier congrès ses prétentions à être le Parti du Travail. Retour à la case départ: de LD  en 1972 en passant par la  LD/MPT a LD en 2009. Bon exemple de dialectique spéculative!
  • Le PCS et ses héritiers ne font plus aune référence explicite au Marxisme encore moins à la pensée de Mao-Tsé-Toung !
  • Le GR (Groupe de Rufisque) a pour l'essentiel fini dans les basques d’Iba Der Thiam (des 1500 à la CDP/Garab-gi) !
  • Le GAREP et ses héritiers sont pour l'essentiel aujourd’hui sous le manteau de la société civile, dont certains preneurs de positions de rente dans le système libéral de Wade!
  • Le Parti et ses militants ont payé au prix fort cette indépendance et ce statut qui lui confère un rôle unique dans le paysage politique de notre Pays.
  • Oui a une unité de la gauche qui ne fait pas l'impasse sur les problématiques déjà résolues par les luttes de ces dernières décennies, sur une clarification des positions politiques et idéologiques précises des forces de gauche en présence et sur les perspectives que cela peut apporter aux travailleurs de ce pays et pas seulement au regard des compétitions électorales qui ont fini par absorber l'essentiel de nos efforts et ont mis un frein réel au travail d’édification et de développement du Parti  afin qu’il soit capable de jouer son rôle dans les luttes populaires et dans la lutte pour débarrasser notre pays de l'emprise néocolonialiste et d'ouvrir les chantiers de la transformation sociale au service de notre peuple.

Bamba  Ndiaye, militant  PIT